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France

Budget 2024 : L’Effet Corrosif du 49.3

Le « déni de démocratie » dénoncé par les députés de droite et de gauche est à la fois réel et induit par la banalisation de l’usage de cet article de la Constitution. Mais les oppositions ne marquent pas de points, incapables de s’unir autour d’un contre-budget.

Attendu et banalisé autant qu’il se peut par le gouvernement, le déclenchement de l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le volet recettes du projet de loi de finances pour 2024, mercredi 18 octobre, n’en constitue pas moins un révélateur : la démocratie française n’est pas au mieux de sa forme pour affronter les défis du moment.

Le budget, et toutes les questions qui en découlent chaque année, a des conséquences très directes sur la vie des Français parce qu’il touche à des sujets comme le pouvoir d’achat, le logement, les impôts, les dépenses, la dette. Or la façon dont se sont déroulés ou plutôt dont n’ont pas eu lieu les débats montre à quel point la représentation nationale a du mal à traiter sérieusement de ces thèmes, faute simplement de s’écouter. Le treizième 49.3 déclenché depuis le début du second quinquennat d’Emmanuel Macron signe un échec collectif.

Alors que la croissance ralentit et que la dette redevient un sujet de préoccupation, le gouvernement n’avait qu’un objectif : écourter au plus vite le supplice. Pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, il n’était pas parvenu à faire adopter en commission de lois le volet recettes de son texte. Laisser durer le débat en séance publique, c’était prendre le risque d’affaiblir la ligne de crête qu’il défend pour un résultat connu d’avance. Quelles que soient les concessions, aucun groupe de l’opposition ne lui aurait prêté main-forte puisque tous avaient annoncé qu’ils voteraient contre. La décision est tombée très tôt, après la discussion générale et avant l’examen des amendements en séance publique.

Le gouvernement a mis fin aux débats sur la première partie du projet de loi de finances à l’Assemblée

Le « déni de démocratie » dénoncé sur les bancs de la droite comme sur ceux de la gauche est à la fois réel et induit par la banalisation de l’usage du 49.3. À partir du moment où chacun intègre que la discussion finira par un engagement de responsabilité du gouvernement suivi par le dépôt de motions de censure vouées à l’échec, la discussion n’en devient que plus conflictuelle. En commission des finances, les oppositions n’ont eu qu’un objectif : déconstruire la copie du gouvernement pour affirmer leur propre credo axé sur des hausses d’impôts, ou au contraire sur des baisses.

Dans la majorité, les petits partis satellites n’ont quant à eux pas hésité à voter, avec l’opposition, des amendements dont le gouvernement ne voulait pas. Ils voulaient exister mais savaient cependant que leur fronde serait sans conséquence puisque tout finirait par un engagement de responsabilité.

De ce jeu de rôle, personne ne sort gagnant. La première ministre, Élisabeth Borne, est en passe de devenir la « dame du 49.3 », un rôle ingrat qui affaiblit sa stature au moment où deux membres de son gouvernement, Gérald Darmanin et Gabriel Attal, prennent la lumière.

A Lire : Stéphane Séjourné et la Réforme des Retraites : Positionnement et Enjeux (49.3)

Les oppositions ne parviennent pas à marquer des points car elles sont incapables de s’unir autour d’un contre-budget. Autant le dépôt de motions de censure suscitait quelques frissons en début de législature, autant leur multiplication contribue à émousser leur effet.

Mercredi soir, le gouvernement a fait savoir qu’il intégrait à son projet initial 358 amendements, dont 43 choisis parmi ceux que défendaient les groupes d’opposition dits « de l’arc républicain ». Puisque le dialogue n’est pas complètement coupé, il aurait mieux valu, pour tout le monde, que les concessions se négocient au grand jour, dans un débat démocratique digne de ce nom.

Christiano Btf

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